mardi 18 novembre 2008

Vivre en 2025 : quand la PAC aura disparue

Dans un contexte de guerre économique mondiale, les accords de la Politique Agricole Commune étaient perçus comme des entraves à la concurrence libre et non-faussée chère aux neo-libéraux européens.

Alors que tous les agriculteurs la craignaient, la disparition de la PAC dès 2012, a provoqué un bouleversement inattendu pour la France. Dès la première année sans subventions, les fédérations paysanne, les coopératives et les groupes d'intérêt économiques de l'agriculture se sont mis à plancher sur les alternatives à une politique de soutien étatique qui finalement profitait davantage aux grands groupes agro-alimentaires et aux grandes chaînes de distribution.
Les nombreuses expérimentations effectuées tant dans le domaine de la distribution directe que dans celui des engrais et produits de protection naturels ont très rapidement trouver un terreau fertile auprès des exploitations de petite et moyenne dimensions, permettant de réduire radicalement les dépenses d'exploitation et de remonter les prix de vente des produits agricoles.
Grâce au développement et surtout à la démocratisation de l'économie numérique française, les PME agricoles ont vite constitué des communautés de consommateurs régionaux, des réseaux d'échanges et de distribution de proximité et construit un tissu professionnel d'un genre nouveau. L'effort pédagogique des fédérations paysannes a contribué considérablement à la transition d'une grande partie des PME agricoles à une culture biologique et durable sans réelle perte de résultat au niveau de l'exploitation et à des méthodes alternatives à l'usage conventionnel de pesticides et d'engrais chimiques.
Au niveau européen, les grands perdants de cette disparition de la PAC ont d'abord été la Grande Bretagne qui n' a plus bénéficié de sa ristourne arrachée de main de maître par Me Thatcher. Indirectement, les pays nouveaux entrants de tradition agricole n'ont pas pu bénéficier d'une révision ou d'une extension de cet accord.
Au niveau économique, cette mesure apparemment libérale a permis à une foule de PME agricole de passer sous les filets libéraux des groupes agro-alimentaires, pharmaceutiques, semenciers et surtout des fabricants de produits chimiques agricoles. Bien que le manque à gagner n'ai pas été détecté immédiatement, les cinq années qui ont suivit se sont montrer décisives et l'intense lobbying privé auprès de Bruxelles n'a pas porté ses fruits. Le principal ennemi des lobbyistes a été l'institut européen de l'AOC mis en place dès 2010, principal défenseur des terroirs, et très défendu par les élus souverainistes ou nationalistes des différents pays concernés par cette « revanche agricole ».
En 2025, l'agriculture française se porte bien, grâce à un tissu local désormais soutenu par les institutions régionales et par la participation active et citoyenne des consommateurs. De nombreuses coopératives ont éclaté, se libérant de dispositifs contractuels défavorables et de nombreuses sociétés de service se sont constituées autour de places de marché virtuelles mettant en relation les PME agricoles et les consommateurs. Les AMAP se sont multipliés, diversifiés et développés pour atteindre des niveaux qualitatifs et quantitatifs comparables aux Teikei japonais, leaders de cette forme d'agriculture citoyenne.
Désormais, la France fait partie des pays participants au programme pédagogique agricole des Nations unies. Ce programme a pour objectif de permettre aux pays les moins développés de bénéficier d'un véritable échange culturel et technique agricole permettant à chacun d'apprendre et de développer des programmes de recherches autour de l'agriculture en matière de production d'énergie, de gestion des sols, de gestion des ressources, d'organisation de la distribution, et de nombreux autres domaines techniques et culturels. Ce tirage vers le haut par un partage des connaissances réciproque a permis la sortie de nouvelles régions du monde de la faim et une entrée dans l'économie mondiale.
Ce retournement de situation n'a pas affecté bien longtemps les grandes chaînes de distribution qui ont rapidement trouvé des produits alimentaires concurrents dans les pays de l'Est et en Asie. Ces derniers permettent de combler les demandes et les besoins de la population immigrée en provenance essentiellement du sous-continent indien et de la Chine et qui ne peut trouver auprès des structures de proximité les denrées traditionnelles de son alimentation.
Sans aucun doute la disparition de la PAC, à un moment où les principaux intérêts privés du secteur agro-alimentaire ne s'étaient pas concertés pour verrouiller leur marché, a été l'une des mesures qui aura permis une réelle avancée de la politique de développement durable et de protection de l'environnement. Les retombées directes et indirectes de cette authentique libéralisation de l'agriculture sont nombreuses aussi bien dans le domaine de la santé, que du regain de l'exportation des produits de terroirs qui ont remplacer l'exportation des produits de base, ou encore du retour d'une forte proportion de jeunes au métiers de la terre et aux services qui l'entourent désormais. La France, souvent modèle en matière de réformes, s'est, une fois encore, illustrée comme un leader de l'innovation dans un domaine que l'on croit, à tort, fermé au progrès.

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